L’Union Syndicale Progressiste des Travailleurs du Niger

Je rencontre le Syndicat Union Syndicale Progressistes des Travailleurs USPT dans leur maison de plusieurs pièces sur une petite cour. M. Chaibou Tankari, le secrétaire général adjoint me présente la dizaine de personnes présentes dans la réunion. Ces hommes et ces femmes sont tous et toutes représentants de sections syndicales. Le syndicat existe depuis les luttes pour la démocratie de 2006. Il rassemble des syndicats dans le public et le privé. Les enseignants, les travailleurs de la santé, et de l’administration de l’État et des municipalités composent les syndicats du secteur public tandis que dans le privés les sections de l’USPT organisent les boulangers, les chauffeurs de taxi et également, fait rare chez nous, les travailleurs des ONG !

Trois femmes sont responsables d’une importante section féminine. Les luttes menées sont d’abord celles contre la précarisation du code du travail. Comme partout, les préconisations de l’OCDE et des « bailleurs de fonds » font pression sur le gouvernement du Niger pour précariser les salariés, faciliter les licenciements, les embauches en CDD et l’intérim. Nous parlons longuement de nos luttes respectives. Les camarades sont au courant de l’intensité des luttes contre la Loi Travail en France, de leur échec et souhaitent en comprendre les raisons. Ils viennent d’ailleurs de mener une importante grève en décembre 2016 pour la sauvegarde des leurs acquis sociaux.

Bien sûr, un des gros problèmes du Niger est le « travail informel » et la difficulté à organiser ces travailleurs/ses sans cotisations sociales et sans droits. Je partage mon expérience du travail « au noir » en Europe qui concerne maintenant des centaines de milliers de travailleurs, qui tous vont être privés de retraite puisqu’il leur aura été impossible de cotiser pendant les 42 ans exigés en France. Nous découvrons bien des points communs entre l’Afrique et l’Europe, encore une fois comme souvent lors de ce voyage…

Car l’USPT revendique son objectif d’abolir le capitalisme au Niger et pour cela une coopération entre organisations du Sud, l’Est et le Nord est nécessaire. Pour créer cette coopération, il faut organiser un cadre d’échanges. Pour l’USPT le but est clair : défendre le travailleur pour qu’il vive mieux, avec des services publics et un Etat au service du citoyen tel qu’il devrait fonctionner au 21ème siècle. Pour un pays considéré comme pauvre comme le Niger, il n’est pas possible d’abolir le capitalisme sans abolir l’impérialisme occidental, l’exploitation des ressources naturelles par les entreprises étrangères et sans supprimer les bases militaires françaises et otanesques dans le Nord du pays. Mais ici personne ne baisse les bras. La survie de chacun et de chacune est en jeu. Un camarade du RNDD me fait plus tard part de sa profonde préoccupation pour la stabilité du pays, occupé au nord par les militaires français, américains, belges et allemands et attaqués au Nord et à l’Est, sur les bords du lac Tchad, par des « djihadistes » plus nombreux et bien armés au fur et à mesure que la présence occidentale se solidifie.

« Les militaires étrangers ont décidé de déporter les populations riveraines du lac Tchad menacés par Boko Haram. Mais comment défendre notre territoire si nous déplaçons et spolions nos propres citoyens ? » déclare ce camarade. « Auparavant nous négociions nous même avec les populations touaregs et nous arrivions à régler nos différents. La présence occidentale ne nous sécurise pas, bien au contraire, elle dresse ces populations contre nous et affaiblit la légitimité de l’Etat ».

Les militants de l’USPT me font part de leur détermination à développer leur syndicat et leur lutte. Ils sont conscients qu’il est nécessaire d’organiser des formation sur la stratégie politique, la négociation mais aussi sur les enjeux géopolitiques. Ils et elles veulent inviter au Niger nos camarades des organisations syndicales, politiques, des mouvements de femmes d’Europe occidentale, de l’Europe de l’Est mais aussi de l’Afrique du Nord. Nous nous promettons de nous revoir et de travailler à des liens communs. Chaque lien amical est un caillou dans la chaussure du système…. Il en est aussi ainsi avec les liens avec les partis amis. Je rencontre ainsi le Mouvement Patriotique Nigérien Kishin Kassa.