Le meilleur karité de la région – la coopérative de Madame Ilboudo

Le lendemain nous partons avec mon camarade Souleymane 30km en moto pour la commune de Saaba, un gros bourg aux maisons  alignées autour d’une joli mosquée stylée avec son petit minaret. Nous sommes guidées par Emmanuelle, étudiante en maitrise de gestion du patrimoine et spécialiste des fameuses statues qui ornent les larges avenus de Ouaga. Je brûle d’en savoir plus sur son travail. Elle nous emmène chez sa tante, Madame Ilboudo qui est spécialiste du meilleure beurre de karité que j’ai vu au cours de ce voyage.

Village de Saaba

Nous sommes reçus dans la petite cour d’une petite maison sous les mangiers. Madame Ilboudo est une femme expérimentée mais alerte. Elle nous montre d’abord son panier de boules d’épices, le fameux soumbala. Et puis, son or à elle confectionné avec un savoir faire ancestral sans arrêt perfectionné. Les 5 saladiers sont remplis d’un beurre de karité onctueux comme de la crème, du beurre de la meilleur qualité. La texture est fine et aérienne, son gras léger, son odeur douce et sa couleur donne envie de le manger! Je me renseigne à nouveaux sur les étapes de fabrication, consciente que les petits secrets de production de chaque femme ne doivent néanmoins pas être dévoilés aux profanes. Madame Ilboudo me montre le 4 grandes jarres en terre cuite ou les noix de karité réduites en poudre chauffent pendant des heures au feu de bois. La jarre au contenant foncé est la première étape de fabrication. Lorsque le karité finit par lâcher sa graisse il prend alors une agréable couleur marron clair et une douce odeur de chocolat ainsi qu’une texture de crème: Mais auparavnt, les noix décortiquées qui s’empilent dans un grand sac de toile doiven être séchées pendant des heures au soleil sur une natte propre. La productrice étale les noix, me montre comment les piler sur un mortier avec un pilon en bois. Elle rit quand je m’y essaye. C’est là qu’elle me dit que les jeunes filles trouvent humiliant ce type de travail physique. Moi je trouve que le fruit sec s’écrase facilement et que ce n’est pas plus dur que les heures passées à décortiquer les noyaux de cerises pour les confitures de ma grand mère, des heures assise sur un petit tabouret sous les arbustes à ramasser un à un les fruits du cassis ou de groseilles, ou à éplucher et laver les légumes destinés à être mis en bocaux, ces heures que j’ai passées avec ma grand mère, mes tantes et ma mère presque tous les étés. Cependant ma grand mère était charitable avec les jeunes générations. Une fois le coup de main donné aux femmes nous pouvions sortir jouer et courir dans les champs. Jamais je n’ai méprisé cet admirable travail de conserverie domestique qui nous permet de maintenir notre culture et nous a permis de survivre aux différentes disettes des plans d’ajustement structurels du capitalisme.


Maison et lieu de production du karité par Madame Ilboudo

Madame Ilboudo et son œuvre
Le beurre de karité pur
Noix de karité séchées
Séchage et broyage des noix de karité
Je m’essaye au broyage
Cuisson dans les jarres
Le résultat du long et minutieux travail

J’admire le travail minutieux et inventif de Madame Ilboudo d’autant plus que je connais maintenant sa valeur. Avant d’acheter une provison conséquente de ce produit magique qui m’enlève tous les maux, des brûlures aux vergetures, je suis mon camarade militant qui m’indique dans la cour un grand arbuste ressemblant à un noyer. C’est le coton domestique, la plante endémique d’ici. Il me montre la petite fleur jaune et déjà le fruit d’où s’échappe le moelleux blanc du coton. « Ce n’est pas du OGM, c’est notre coton et notre fierté » – Souleymane m’emmènera tout à l’heure visiter la coopérative Africa Tiss qui tisse les fibres solides et légères de ce produit qui ne ressemble en rien au coton industriel que nous portons en Europe.

Le camarade Souleymane avec le vrai coton burkinabé

Nous discutons aussi de la nécessité pour le magnifique karité de Madme Ilboudo et de sa coopérative de femmes Kalgonde Na Pooknini qui signifie « s’éveiller » en Moré, de disposer de jolis emballages pour pouvoir faire un commerce direct. Hélas le consommateur européen blasé n’achète pas de cosmétiques meme bio s’il n’est pas attiré par un emballage coloré. Je pense à une boite en bois ou en vannerie avec écrin en tissu qui pourraient remplacer avantageusement le plastique.

C’est ainsi qu’en discutant nous retournons à Ouaga pour rencontrer Madame Traoré, productrice de produits alimentaires transformés et emballés dans la maison-atelier de Tout Super.